Chaque été, les rodéos urbains sont un cauchemar pour les habitants de la métropole lilloise. Et pour les forces de l’ordre accusées de ne rien faire quand il s’agit de protéger la vie des chauffards, des usagers et des policiers eux-mêmes. Le maire d’Halluin a pris un arrêté anti-quad il y a un mois. Cette démarche inédite, en théorie inapplicable, est-elle efficace ? Décryptage.
ANGÉLIQUE DA SILVA-DUBUIS 8/07/2017
Un phénomène pris très au sérieux par les autorités : VRAI
Les rodéos urbains ont fait quatre morts en quelques semaines à Roubaix. Sur deux ou quatre roues, ces jeunes exaltés par la vitesse sont le souci majeur des forces de police et des élus locaux en été. Des maires confrontés à l’exaspération de leurs administrés et à un sentiment d’impunité face aux dangers de ces runs et aux nuisances sonores. La semaine dernière, Michel Lalande, le préfet, a réuni les élus de la métropole en présence de Didier Perroudon, directeur départemental de la sécurité publique pour un plan d’actions conjoint. Principale difficulté: l’interpellation ne peut avoir lieu que dans le cadre d’un flagrant délit.
Les quads sont interdits aux mineurs : FAUX
Diminutif de quadricycle, le quad est classé en deux catégories quand il est homologué. Les quadricycles légers dont la cylindrée n’excède pas 50 cm3 et 45 km/h. Pour eux, aucun permis n’est nécessaire. Comme les scooters, ils peuvent être pilotés par des mineurs dès 14 ans à condition d’être titulaire du brevet de sécurité routière (BSR). Le permis est obligatoire pour les modèles dont la cylindrée dépasse 50 cm3 et 45 km/h. Y compris sur terrain privé comme pour les motos. Les quads non-homologués comme les motocross ne peuvent pas être utilisés sur la voie publique. Leur usage est très réglementé.
Plus de 220 véhicules retirés de la circulation : VRAI
Concrètement, les policiers ne peuvent intervenir que dans le cadre d’une infraction au Code de la route : défaut d’assurance ou d’immatriculation, non port de casque, débridage ou absence de permis de conduire. Les interpellations ne peuvent être réalisées que dans le cadre d’un flagrant délit. La mise en danger de la vie d’autrui ne peut être invoquée qu’à l’endroit d’une personne clairement identifiée. Voilà pour le cadre. Ensuite, c’est souvent le reproche qui leur est fait, les policiers ont pour consigne de ne pas prendre les auteurs de rodéo en chasse pour éviter l’accident et les victimes collatérales. Cela étant, 110 infractions ont été relevées depuis le début de l’année dans la métropole dans le cadre d’opérations de lutte contre les rodéos. Les forces de l’ordre ont d’autres moyens pour contrer ce phénomène. Quelque 220 bolides ont été retirés de la circulation suite à des saisies sur le secteur de Lille, Roubaix et Tourcoing. Un travail qui demande de l’investigation et du temps. Ces saisies concernent beaucoup d’engins volés, notamment des motocross. Prévus pour les circuits, ils n’ont rien à faire en ville. Les policiers s’appuient également sur la vidéo-surveillance pour identifier les chauffards.
L’arrêté du maire d’Halluin a été retoqué par le Préfet : FAUX
Le 2 juin dernier, Gustave Dassonville, maire (LR) d’Halluin, prenait un arrêté interdisant la circulation de tous les quads, homologués ou non, sur le territoire de sa commune, en agglomération. « Ils peuvent s’amuser à la campagne mais ça ne les intéresse pas puisqu’ils n’embêtent personne » peste l’élu. Cet arrêté, inapplicable en théorie, n’a pas été retoqué par la préfecture pour le moment. Le Préfet a deux mois pour déférer un arrêté « illégal » au tribunal administratif. « Je souhaite bon courage au tribunal. Non seulement mon arrêté est très motivé (une dizaine d’items, ndlr) mais surtout le juge prendrait une sacrée responsabilité en l’annulant s’il survenait par la suite un accident dans ma commune. » Le message est clair. Mais cet arrêté est-il efficace ? « Les réactions des Halluinois sont mitigées, admet l’élu. Certains habitants me disent que c’est plus calme, d’autres semblent toujours aussi exaspérés. Mais je constate que la Police nationale est plus présente et j’ai cru comprendre qu’il y avait eu quelques interpellations. » Gustave Dassonville a évoqué la situation d’Halluin lors de la rencontre des élus en préfecture. Il a clairement demandé à ce que les rodéos relèvent du délit et non plus de la simple infraction. « La législation n’est plus adaptée à notre époque » souligne le maire qui estime faire de la pédagogie et non de la répression tous azimuts après un premier arrêté anti-rassemblement en 2014 qui avait fait polémique : « C’est mon devoir de montrer à ces jeunes que leur comportement est dangereux ! »